De grands nuages gris estompent l'horizon
Le soleil jette à peine un regard à la terre
Les feuilles et les fleurs roulent sur le gazon
Et le torrent gonflé gronde comme un tonnerre
Adieu le soir serein ! adieu le matin clair !
Adieu le frais ombrage ! adieu les folles courses !
Adieu les voix d'oiseaux qui se croisent dans l'air !
Adieu les gazouillis des buissons et des sources !
Plus de gais moissonneurs attroupes dans les blés !
Plus d'amoureux reveurs sous les tonnelles !
Plus de concerts la nuit sur les flots etoilés !
Dans les prés et les bois plus de parfums, plus d'ailes !
Mais parfois le soleil, dechirant les brouillards,
Verse des lueurs d'eau sur les eaux et les chaumes
Et nous croyons ouir les oiseaux babillards
Nous respirons partout de sauvages aromes
L'arbre nu nous parait se rhabiller de vert
Le vient atiedi joue avec ses rameaux souples
Et dans le creux du val, de feuilles recouvert
Il nous semble encore voir errer de joyeux couples
Ainsi que la saison des fleurs et des amours
Se sont evanouis mes reves de jeunesse
Un nuage a passé tout à coup sur mes jours
Derobant un soleil qui me versait l'ivresse.
Cependant, quelquefois, à travers mon ciel noir
Un reflet radieux glisse à mon front morose
Alors dans le passé lumineux je crois voir
De mes bonheurs enfuis flotter l image rose
Et puis devant mes yeux rayonne l avenir
L'esperance renait dans mon ame ravie
Et le rayon qui brille un instant sur ma vie
C'est celui que le coeur nomme souvenir
William Chapman
