La montagne au soleil, ou croissent pèle-mèle
Cytise et romarin, lavande et serpolet
Enfle de mille sucs leur bleuatre mamelle
On boit tous ses parfums quand on boit leur lait.
Tandis qu' assis au pied de quelque térébinthe,
Le patre insoucieux chante un air des vieux jours,
Elles, dont le collier par intervalles tinte,
Vont et viennent sans cesse et font mille détours.
En vain, le mistral souffle et chiffonne leur soie :
Leur bande au paturage erre des jours entiers.
Je ne sais quel esprit de conquete et de joie
Les anime à gravir les plus après sentiers.
Ton gouffre les appelle O Méditerranée !
Qu'un brin de mousse y croisse, une touffe de thym,
C' est là qu 'elles iront, troupe désordonnée,
Que le péril attire autant que le butin.
Dans les escarpements entrecoupés d 'yeuses,
Elles vont jusqu' au soir, égarant leurs ébats ;
Ou bien, le cou tendu, s ' arretent, curieuses,
Pour voir la folle mer qui se brise là-bas.
Joseph AUTRAN